Bonneau Pascal JR (1862-1911)* ref.193

Source : Le livre ‘’La Montagne de bois''

  • Année et lieu de naissance : 21 décembre 1862 à Ste-Brigide Co Iberville, QC
  • Année et lieu du décès :  
  • Nom du père :  Bonneau Pascal SR (1840-1902)
  • Nom de la mère :  Messier Célina 
  • Profession :  Rancher
  • Épouse :  Bellehumeur Eugénie ( fille du docteur Charles Bellehumeur)
  • Mariage : 12 février 1889 à Ste-Brigide Co Iberville, QC
  • Enfants avec épouse :  


«Cattle King of Willow Bunch»  ''Roi de la vache''

Il a été nommé ainsi car en 1900 il possédait 5000 à 6000 vaches. Il a été le 1er Bonneau à s’établir à la Montagne de Bois. Son père, Pascal l’avait envoyé aux États-Unis pour apprendre l’élevage et aller à l’école du cowboy, dans les ranchs du Montana. Mais selon les dire du curé Rondeau, il s’était plutôt attardé à la traite de la fourrure. 

Selon sa soeur, Albina,  celui-ci aurait attrapé le dernier bison de la région, pensant que c’était une vache égarée. Le bison aurait été attaché devant le magasin général, selon les écrits, pendant quelques semaines. 

Un groupe de citoyens de Willow Bunch, vers 1900. Debouts: de gauche à droit Pascal Bonneau (fils), un employé, Octave Hallé, Zotique Desautels, David Morin et Hormidas Granger. Assises: Mme N.-R. Parks, Mme Octave Hallé et Mlle Antonia Granger, enseignante.


Pascal Bonneau JR sur son cheval, fond les Ralliements des Familles Bonneau


Texte retrouvé dans le fond du Ralliements de Familles Bonneau 


Pascal Bonneau Jr et Eugénie Bellehumeur

Par Gilles Bonneau, Ste-Foy (Québec)

Après avoir suivi les faits et gestes de Pascal Bonneau Sr et de Célina Messier durant trois épisodes, nous débutons ici une série de reportages sur leurs enfants. On se rappelle que Pascal Sr et Célina décidèrent de quitter le Québec avec leur famille devenue trop nombreuse pour survivre sur leur petite ferme de Ste-Brigide d’Iberville. Ne voulant pas quitter le Canada pour les états de la Nouvelle-Angleterre comme plusieurs familles canadiennes-françaises ont fait à l’époque, ce couple d’aventuriers déménage avec toute leur famille à St-Boniface au Manitoba en 1879 pour travailler sur la construction du Canadien Pacifique. En 1882, Pascal Sr et Célina ainsi que leurs enfants : Célina, Pascal Jr, Trefflé, Angélina, Victoria, Joseph-Arthur et Albina sont installés dans la nouvelle capitale des Territoires du Nord-Ouest, Régina, en Saskatchewan…Nous reprenons ici le fil des événements de cette  famille de commerçants et de ranchers avec Pascal Bonneau Jr : le vrai cowboy de cette famille remarquable, c’est lui…!

La « Coulée aux lièvres… »

Pascal Jr est né au Québec en 1862 à Ste-Brigide d’Iberville dans la vallée du Richelieu de même que tous les enfants de Pascal Sr et de Célina. Dans leur histoire de Willow Bunch publiée en 1970, les abbés C. Rondeau et A. Chabot racontent qu’en 1900, Pascal Bonneau Jr possédait de 5000 à 6000 têtes de bétail et se voyait décerner le titre flatteur de « Cattle King of Willow Bunch ». Pour sa part, Laurier Gareau mentionne qu’en 1882, son père Pascal Sr l’avait envoyé étudier l’élevage tel que pratiqué dans la région de la frontière américaine et de la Montagne de Bois. L’apprentissage du métier de « cowboy » à cette époque se faisait dans les grands ranchs du Montana. Mais selon l’abbé Rondeau, le jeune homme se livra plutôt au commerce des fourrures. Ce n’est qu’en 1886 qu’il se lance dans l’élevage en établissant son ranch à la « Coulée aux Lièvres » en suivant son père, Pascal Sr, dans la vallée de la Big Muddy. L’année précédente, Pascal Jr est retourné à Régina pour assister au procès de la rébellion des Métis et qui se termina par la condamnation à mort de leur chef, Louis Riel. Ce dernier fut pendu à Régina, le 16 novembre 1885 et Pascal Jr assura la protection du corps de Louis Riel avec son père jusqu’à son transport par train à Winnipeg au Manitoba. Louis-Philippe Bonneau dans son livre : Ils sont venus naguère…les Bonneau en Amérique du Nord  mentionne que Pascal Bonneau fils accompagna la dépouille de Riel jusqu’à Winnipeg afin de la remettre à ses proches.

La « Coulée aux lièvres » était considérée à l’époque comme l’un des endroits les plus isolés en Saskatchewan et reconnue pour ses voleurs de chevaux. Située près des frontières du Montana, la topographie de cette vallée où coule tranquillement la rivière Muddy, a servi pendant plusieurs années d’abris aux voleurs de bétails qui pouvaient facilement les dissimuler dans ce paysage de «badland» et le vendre sans aucune contrainte de l’autre côté de la frontière. Les abbés Rondeau et Chabot écrivent : « Les voleurs de chevaux pullulaient dans les plaines. Pour protéger nos Métis contre leurs incursions, la Police Montée stationna, en 1886, à Willow Bunch, un détachement sous les ordres du sergent Martin ». Même la Police Montée elle-même était l’objet de ces pillages…En 1886, deux montures ont disparues de l’étable à Wood Mountain. Les chevaux furent retrouvés mais les voleurs, recherchés pour meurtre aux Dakotas, prirent la fuite. Ces grands espaces non ceinturés qui servaient de pâturage aux bétails occasionnaient bien des problèmes à leurs propriétaires. Le bétail rapporté volé était souvent égaré dans l’immensité du paysage…

Une histoire de vol de chevaux…

Un des bandits les plus notoires de cette époque fut Henry Yeuch, alias « Dutch Henry ». Il conduisait des colonnes de chevaux du Montana jusqu’à Régina pour les vendre. Sur son chemin de retour, il s’arrêtait à Wood Mountain, embauchait des acolytes et allait de ranchs en ranchs offrant ses services pour dresser et dompter les chevaux. Un bon jour, Pascal Bonneau père, qui opérait son ranch à l‘époque près de la rivière Big Muddy engagea « ces compétences » pour s’occuper de son cheptel. Au moment où il travaillait chez Pascal Sr, ce  Dutch Henry était recherché au Montana pour vol de bétails. Comme la Police Montée n’était pas tellement familier avec ce voleur, c’est Pascal Jr qui l’a formellement identifié et permit son arrestation…un geste que Dutch Henry n’était pas près d’oublier ! Aux environs de 1902, Pascal Jr accompagné de son frère Joseph, se rendent à Williston au Nord Dakota pour acheter 250 chevaux. Ils décident d’établir leur campement d’hiver sur le côté américain de la frontière, à la réserve indienne des Sioux près de Poplar au Montana ; un feu de prairie important avait semble t’il ravagé un partie importante des pâturages de la vallée de la rivière Big Muddy. Il laissa son frère Joseph en charge du troupeau en compagnie de Dutch Henry et d’un autre homme, possiblement Edward Shufelt. Au cours des mois d’hiver, Joseph retourna chez lui pour s’occuper de ses propres affaires et lorsqu’il revint au printemps prendre possession des cheveaux, Dutch Henry le désarma et pointant son revolver dans les côtes de Joseph Bonneau avec insistance, il lui dit : « ride, and keep on riding » !Joseph comprit le sérieux de la situation et décida de revenir sans les chevaux.

Quelque temps après cet événement, une nouvelle  circula à l’effet du passage à Wood Mountain d’une colonne de chevaux portant « le sceau » de Williston et qui se dirigeait vers Moose Jaw. Revenant d’un voyage à Montréal, Pascal Jr  retrouva 100 de ses chevaux à Moose Jaw en possession d’un certain Jack Sallet, un ancien membre de la Police Montée à Wood Mountain. Ce dernier déclara les avoir acheter en toute bonne foi de Edward Shufelt qui lui à son tour, signifia les avoir achetés  honnêtement de Dutch Henry en exhibant un reçu d’achat de 12,000$. Deux procès se déroulèrent à Régina sur cette affaire pour finalement aboutir à une condamnation des deux larrons. Shufelt fut envoyé en prison où il mourut quelques années plus tard ; quant à Dutch Henry, plusieurs rumeurs ont circulé à son sujet sans confirmation aucune, l’une l’envoyant même en Argentine où il serait mort de vieillesse!

Une histoire d’amour…  

Il était de notoriété dans la famille de Pascal Bonneau Sr et de Célina Messier que le fils, Pascal Jr, aimait revenir souvent dans la région de Montréal durant les mois d’hiver pour y brasser des affaires !  Il était considéré par tous, comme un homme d’affaires prospère et très perspicace. Attentif et l’œil ouvert, il flairait toujours la bonne affaire principalement dans les domaines de l’immobilier et de l’achat de bétails de qualité qu’il ramenait à l’Ouest dans son ranch. C’est au cours de ses séjours au Québec, qu’il fit la connaissance de sa future épouse, Eugénie BELLEHUMEUR,

institutrice dans son village natal, Ste-Brigide d’Iberville, et en 1889, ils se marièrent à l’église de cette paroisse. Eugénie était la fille du docteur Bellehumeur qui lui rendit  visite à Willow Bunch au cours de l’hiver 1897 ; il sera présent au moment du décès de la mère de Pascal Jr, Célina Messier.

Les personnes qui ont connu Eugénie la voyaient comme un personnage austère et sévère ; une personnalité sans doute influencée par son éducation et sa profession de « maîtresse d’école »…Il fallait quand même qu’elle possède un esprit d’aventure certain pour suivre son « cowboy de mari » d’abord à Moose Jaw en Saskatchewan et par la suite, dans la vallée de la rivière Big Muddy. Elle s’y adapta très rapidement et quelque temps après son installation dans sa maison et son nouvel environnement, on l’a vit seule, conduire avec assurance un attelage de deux chevaux pour ses déplacements. Un incident qu’elle aimait raconter, concerne l’emprisonnement de son mari, Pascal Jr, au moment où il livrait du bétails à Winnipeg. Certains Métis de la région l’accusait de vol de bétails et la police n’eut pas le choix de l’arrêter, n’ayant pas les preuves sur lui. Eugénie mise au courant, s’empressa en utilisant les moyens les plus rapides, de se rendre à Winnipeg pour apporter tous les documents nécessaires afin d’innocenter son mari sur le champ et le sortir de ce cauchemar…

Pascal Jr et Eugénie…

En 1904, Pascal Jr fut mêlé à l’affaire du Géant Beaupré lorsque la famille Beaupré lui demanda d’aller chercher le corps du Géant à St-Louis, Missouri et, nous connaissons la suite maintenant. Pascal Jr semblait aimer se retrouver dans de telle aventure et on raconte qu’il a eu plus que sa part dans ce genre de situation. Il possédait des propriétés à Régina, Montréal,  Vancouver et dans plusieurs autres régions du Canada. Il a acquis une fortune considérable pour le temps dans une période relativement courte. Malgré cette prospérité, il demeurait très sensible aux besoins des autres moins fortunés principalement dans sa famille. N’ayant pas eu d’enfant, il contribua financièrement à l’éducation de ses deux nièces, filles de sa sœur Victoria. Les deux filles, Robertine et Marie Girard, reçurent leur éducation durant six ans dans un pensionnat de Lebret, situé dans la vallée de Fort Qu’Appelle en Saskatchewan.

 Également, Pascal Jr joua un grand rôle  dans l’établissement de la municipalité de Willow Bunch en 1910. Au cours de cette même année, il contracta une méningite et rapidement son décès fut constaté le 29 janvier. Il était à peine âgé de 48 ans. Son épouse Eugénie lui survivra pendant encore plusieurs années. Les biens accumulés par Pascal Jr ne la laissa pas sans ressources financières. Elle demeura quelque temps à Willow Bunch et par la suite, elle fit de nombreux voyages à Montréal, en Californie et en Floride. Elle demeurait toujours attentive aux nombreux besoins des autres et financièrement, elle aida largement les membres de la famille Bonneau. Elle aimait beaucoup porter des bijoux et exhibait fièrement ses bagues avec des diamants à ses doigts. À cette époque, elle était loin de la personne timide que l’on connaissait ! Elle revint vivre ses dernières années à Willow Bunch en s’installant confortablement dans un hôtel de style européen, bénéficiant d’une excellent santé. Puis, elle fit une mauvaise chute et se brisa la hanche ; ce fut le début de la fin pour Eugénie car elle ne devait plus jamais marcher suite à ce malencontreux accident. Elle quitta l’hôpital pour une maison de convalescence à Gravelbourg, Sask. où elle mourut le 27 février 1953 à l’âge respectable de 93 ans. Elle repose au cimetière catholique de la paroisse de St-Ignace des Saules de Willow Bunch au côté de son mari, Pascal Bonneau Jr et son frère, Élisée Bellehumeur.

Traduction libre faite par Gilles Bonneau de Ste-Foy, Qué. des écrits de Gilles A. Bonneau de Willow Bunch, Sask. consacrés à ces deux personnages.

Le dernier bison

                                                                                              texte de Laurier Gareau*

Autant que l’arrivée des Blancs, la disparition du bison, à la fin du XIXe sciècle, change considérablement le mode de vie des Indiens et des Métis. Beaucoup de Métis sa lancent alors dans l’élevage. Il y a, dans les récits traitant de Willow Bunch, une histoire que l’on retrouve souvent. C’est que Pascal Bonneau Jr aurait attrapé le dernier bison !

Dans un récit intitulé : Willow Bunch-its early history and development, en dépôt aux Archives de la Saskatchewan, on peut lire : « À cette époque, le bison était maintenant disparu dans la région, le dernier ayant été vu près de Moose Jaw par le père Hugonard et abattu par Joseph Delorme. Deux traînards furent aperçus et pris au lasso en 1884 par Antoine Gosselin et Pascal Bonneau Jr » (traduction p.7)

L’idée que Pascal Bonneau Jr ait attrapé le dernier bison au lasso revient dans d’autres récits. Son neveu, Gwain Hamilton, dans : In the Beginning,  écrit : « L’année précédente, une jeune vache, apparemment égarée d’un troupeau semblable du côté Canadien près de la montagne de Bois, fut prise au lasso et traînée à Régina par un rancher de Willow Bunch, Pascal Bonneau fils. L’animal fut attaché devant le magasin Bonneau à Régina pour plusieurs semaines. » (traduction p.36) Selon Gwain Hamilton, cet incident se serait produit vers 1887.

Enfin, la sœur de Pascal Bonneau Jr, Albina Bonneau-Hamilton, donne une version plus détaillée de cet épisode dans : « These are The Prairies » « Pour un temps, nous avions notre propre bison. Nous le gardions dans un enclos près du magasin et, parfois, je lui donnais des petits coups de bâton à travers les perches de l’enclos. Mon frère Pascal l’avait attrapé dans le pays du sud. Il accompagnait des cowboys au round-up près de la frontière quand ils rencontrèrent un groupe d’arpenteurs ; le cook du groupe s’était égaré dans la prairie. Mon frère offrit d’aller le chercher. Alors qu’il suivait la piste de l’homme disparu, un mustang bondit devant lui d’une coulée et s’échappa en toute vitesse, la queue et la crinière au vent. Pascal mit éperons à son cheval et partit à la poursuite de l’animal. Après une bonne course, il vint assez près pour jeter son lasso au cou du cheval, et s’ensuivit une bataille royale. Le cheval de mon frère était bien dompté à la corde et, enfin, Pascal réussit à calmer suffisamment le mustang pour le rapporter au camp. Puis, se prenant un nouveau cheval, il repartit à la recherche du cook. Près de l’endroit où il avait poigné le mustang, il découvrit un jeune bison et lui jeta un lasso au cou. Poursuivant sa recherche, il trouva enfin le pauvre cook dans un état fou. Il rapporta les trois : homme, mustang et bison à Régina. » (traduction p. 49 )

* texte paru dans La Revue Historique, publication de la Société historique de la Saskatchewan, Volume 2 Numéro 4, Mai 1992.

 


 

 

 

 

 


Recherches : Louise Bonneau (1969 -    )*

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